Art et culture en Catalogne
Le monastère Sant Pere de Rodes
Le monastère Sant Pere de Rodes occupe un site spectaculaire qui domine la Méditerranée et une grande partie de la côte nord-catalane. Consacré en 1022, il suit la règle bénédictine, même si les premières mentions du lieu apparaissent dès le IXe siècle, ce qui explique l’intérêt qu’il suscite rapidement auprès d’autres communautés monastiques. Grâce au soutien des comtes d’Empúries et à de nombreux legs, l’ensemble connaît une phase de croissance importante, marquée par l’agrandissement des bâtiments et l’accumulation de biens.
Les siècles suivants sont plus difficiles. Conflits, épidémies, pillages de pirates et de bandits, interventions de troupes étrangères fragilisent progressivement la communauté. Malgré les efforts des moines pour préserver le patrimoine, la présence bénédictine finit par disparaître et le monastère tombe peu à peu à l’abandon. Aux XIXe et XXe siècles, des effondrements et des spoliations accélèrent la dégradation de l’ensemble.
Classé monument historico-artistique en 1930, Sant Pere de Rodes devient l’objet de campagnes de restauration et de fouilles archéologiques qui redonnent lisibilité au cloître, à l’église, aux bâtiments conventuels et aux structures défensives. Des projections audiovisuelles présentent l’histoire du site et plusieurs itinéraires balisés permettent d’en explorer les abords. Situé sur le territoire d’El Port de la Selva, le monastère demeure aujourd’hui l’un des monuments les plus visités de Catalogne, tant pour son architecture romane que pour le paysage qui l’entoure.
Le Théâtre-Musée Dalí et les lieux daliniens
Le Théâtre-Musée Dalí à Figueres rassemble une partie majeure de l’œuvre de Salvador Dalí, depuis les premiers essais de jeunesse jusqu’aux créations des dernières décennies. Installé dans l’ancien théâtre municipal, reconstruit après la guerre, le musée a été imaginé et conçu par l’artiste lui-même comme une œuvre totale. La scénographie, les espaces et les installations permettent de parcourir les principaux thèmes daliniens, du surréalisme aux expérimentations plus tardives, et d’observer l’évolution de son langage pictural, sculptural et scénographique.
Autour de Figueres, plusieurs lieux complètent cet univers. La maison-musée de Portlligat, près de Cadaqués, occupe un assemblage de petites maisons de pêcheurs ainsi qu’un jardin en terrasses, ponctué de volumes et de structures singulières comme les célèbres œufs monumentaux. L’ensemble, tourné vers la mer, constitue un témoignage direct du mode de vie et de la démarche artistique du couple Dalí-Gala. Le château de Púbol, offert à Gala dans les années 1970, se trouve dans l’arrière-pays de la Costa Brava et conserve un décor conçu pour elle, où l’artiste ne pénétrait que sur invitation. Ce lieu abrite sa tombe depuis 1982.
Certains espaces accueillent encore des manifestations inspirées de l’esthétique dalinienne, qu’il s’agisse de salles de spectacle ou de projets plus ponctuels. L’axe Figueres–Cadaqués–intérieur de l’Empordà forme ainsi un véritable territoire dalinien, où patrimoine, paysages et musées se complètent pour éclairer différentes facettes de l’artiste.
Le Musée du Jouet de Catalogne
Le Musée du Jouet de Catalogne, inauguré en 1982, occupe les anciens locaux de l’hôtel Paris, ancienne demeure des barons de Terrades sur la Rambla de Figueres. Derrière la façade historique, les salles présentent une collection de plusieurs milliers de pièces qui retracent l’univers du jeu et du jouet sur plus d’un siècle. Zootropes, jeux de construction, mécanos, animaux et chevaux de carton, petites voitures, trains, théâtres de poche et poupées illustrent l’évolution des formes, des matériaux et des usages.
De nombreuses photographies anciennes montrent des enfants en situation de jeu et replacent les objets dans leur contexte d’origine. Ces documents facilitent la compréhension des jouets par les plus jeunes et permettent de mesurer les changements intervenus dans les modes de vie et les loisirs. Le musée s’adresse autant aux passionnés de patrimoine qu’aux familles, en proposant un regard sensible sur la mémoire de l’enfance et sur l’histoire industrielle et artisanale liée au jouet.
Le Musée de l’Empordà
Situé lui aussi sur la Rambla de Figueres, le Musée de l’Empordà présente un panorama chronologique de l’art et de l’architecture de la région, de la préhistoire à l’époque contemporaine. Les collections rassemblent des pièces archéologiques, des éléments de sculpture, des objets d’art décoratif et, surtout, une importante section de peinture et de sculpture catalanes et empordanaises des XIXe et XXe siècles.
Les œuvres de Pinazo, Sorolla, Nonell, Martí Alsina, Berga i Boix, Casas, Gargallo, Gimeno, Mir, Masriera, Sunyer, Marés, Dunyach i Casanova et d’autres artistes permettent de suivre l’évolution de l’art catalan depuis le réalisme et le paysage de plein air jusqu’aux mouvements de la modernité et de l’avant-garde. Des toiles de Tàpies, Ponç ou Cuixart témoignent des recherches de la seconde moitié du XXe siècle. Des expositions temporaires viennent régulièrement compléter ce parcours et approfondir certains thèmes ou périodes.
Les vestiges archéologiques d’Empúries
Le site archéologique d’Empúries occupe un emplacement stratégique face à la mer, à proximité de l’actuelle L’Escala. Il réunit les vestiges de la cité grecque fondée vers le VIe siècle avant notre ère par des Phocéens issus de Marseille et ceux de la ville romaine qui lui succède. Les fouilles ont mis au jour des murailles, des rues, des places, des temples, un forum, des maisons patriciennes et une série de mosaïques remarquables.
Le secteur grec conserve notamment des pans de remparts, des espaces publics et des habitations organisées selon un plan relativement régulier. La partie romaine présente un urbanisme plus développé, avec une trame viaire structurée, des thermes et des bâtiments à vocation administrative ou commerciale. Le musée de site expose des sculptures, des objets du quotidien, des monnaies et des éléments architecturaux qui complètent la visite des ruines.
Le village voisin de Sant Martí d’Empúries, installé sur un promontoire littoral, conserve une atmosphère médiévale avec ses maisons et ses remparts bien préservés. Les ruelles étroites, l’église et les points de vue sur la côte rappellent la continuité de l’occupation humaine depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours et renforcent l’intérêt archéologique et paysager de l’ensemble.
La citadelle de Roses
La citadelle de Roses apparaît comme un grand ensemble fortifié qui protège l’entrée de la baie. Déclarée monument historique en 1961, elle englobe derrière ses puissants remparts une surface de plus de cent trente mille mètres carrés. Cette enceinte abrite des vestiges appartenant à différentes périodes, depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque moderne, ce qui en fait un témoignage dense de l’histoire de la région.
Les fouilles ont mis au jour les restes de la colonie grecque de Rhode, un quartier hellénistique, une villa romaine et un monastère de style roman lombard, superposés ou juxtaposés au fil des siècles. La porte de mer, monumentale, rappelle la fonction militaire et stratégique de la citadelle, qui contrôlait l’accès à la ville et au port. Les structures défensives, les fossés, les bastions et les courtines donnent une idée de l’importance de Roses dans le système de défense du littoral.
Un espace muséal implanté à l’intérieur de la citadelle présente maquettes, objets archéologiques, documents et reconstitutions qui aident à comprendre la succession des occupations et des transformations du site. La visite permet de parcourir, en un même lieu, plusieurs couches de l’histoire méditerranéenne, depuis les premiers échanges maritimes jusqu’aux conflits de l’époque moderne.