Histoire de Marseille
Des origines phocéennes à la cité antique
Comme beaucoup de villes méditerranéennes, Marseille se raconte à travers une légende fondatrice. Vers 600 avant notre ère, des navigateurs venus de Phocée jettent l’ancre dans une petite anse dominée par les collines. Protis, l’un d’eux, s’éprend de la jeune Gyptis, issue des populations ligures, et cette union symbolise la naissance d’une cité tournée vers la mer et les échanges. Ce comptoir devient progressivement une place commerciale active, au croisement des routes maritimes entre Orient et Occident. Il faut attendre le premier siècle avant notre ère pour que le port soit véritablement aménagé et que la ville se dote d’infrastructures portuaires plus structurées.
Au fil de l’Antiquité, Marseille sert de relais entre le monde grec, les populations locales et, plus tard, la puissance romaine. Les collines environnantes se couvrent d’installations liées au commerce, à la défense et à la vie religieuse. La ville se développe sur un relief contrasté, entre rivage, plateaux et vallons, ce qui lui donne très tôt une physionomie particulière. Ce positionnement stratégique suscite convoitises, alliances et rivalités, et inscrit la cité dans un réseau d’influences beaucoup plus vaste que son seul territoire immédiat.
Du Moyen Âge aux grandes crises
Entre le Ve et le VIIIe siècle, l’histoire de Marseille est marquée par les guerres, les invasions, les pillages et les épisodes épidémiques qui freinent son essor. La ville connaît des phases de repli, puis de reprise, au gré des équilibres politiques et des échanges méditerranéens. À partir du XIe siècle, un nouveau cycle de croissance s’ouvre. L’abbaye Saint-Victor renforce son rôle, la vie religieuse se structure et l’activité économique reprend de la vigueur. La ville s’affirme comme centre religieux et commercial, tandis qu’une oligarchie marchande prend la main sur les affaires publiques et façonne la République marseillaise.
La puissance de cette élite marchande n’échappe pas aux grands seigneurs. À l’époque moderne, des souverains comme François Ier ou Louis XIV perçoivent la valeur stratégique et économique de ce port. Le premier fait édifier des fortifications et des installations portuaires renforcées. Le second fait construire les forts Saint-Jean et Saint-Nicolas, destinés à la fois à contrôler les accès maritimes et à surveiller une population réputée indépendante. Au début du XVIIIe siècle, la peste de 1720 frappe durement la ville, emportant une part considérable de ses habitants. Malgré ce traumatisme, la cité se reconstruit, réorganise ses quartiers et engage des travaux qui annoncent une nouvelle phase de modernisation.
Bastides, commerce lointain et transformations urbaines
Les XVIIIe et XIXe siècles correspondent à un âge d’or pour le port et pour la ville. Autour du noyau historique se développent les bastides, ces demeures rurales ou résidences familiales entourées de terres, qui ponctuent la campagne environnante. Elles témoignent de l’aisance de certains négociants et industriels, attachés à maintenir un lien entre activité urbaine et terroir. Le port étend son rayonnement vers des espaces lointains, avec des échanges de produits de luxe, puis un commerce plus diversifié sur de grandes routes maritimes.
La croissance démographique et économique entraîne des travaux d’urbanisme majeurs. La Canebière est aménagée comme grande artère, les places et les percées nouvelles transforment le visage de la ville. Les besoins de circulation et de liaison entre quartiers favorisent la mise en place de modes de transport collectifs. Les omnibus assurent les premières liaisons régulières de 1840 à 1879, puis les tramways de la Compagnie générale prennent le relais pendant plusieurs décennies. Marseille se hisse au rang des grandes villes du pays et consolide sa réputation de port incontournable pour les passagers et les marchandises.
XXe siècle, mutations et reconstructions
Au cours du XXe siècle, la situation portuaire attire une population venue de nombreuses régions et pays. La ville devient un point d’arrivée, de transit ou d’installation pour des travailleurs et des familles qui fuient conflits, crises ou cherchent de nouvelles opportunités. Sa composition sociale se complexifie et son paysage urbain se densifie. Dans le même temps, la cité subit de plein fouet les effets des guerres mondiales, des bombardements et des destructions, notamment dans certains quartiers du centre.
Les changements dans le commerce international, la fin de certains trafics traditionnels et les mutations industrielles provoquent un déclin de l’activité de négoce et une montée du chômage. Le développement des hydrocarbures et la spécialisation portuaire dans de nouveaux types de flux permettent cependant de maintenir une activité maritime importante. Le port se réorganise, se modernise, déplace certaines installations et adapte ses infrastructures aux nouveaux formats de navires, en particulier avec la généralisation des conteneurs.
Une métropole méditerranéenne tournée vers l’avenir
Dans les dernières décennies, Marseille entame un vaste mouvement de requalification urbaine et économique. Les quais historiques se transforment, de grands projets réinventent le front de mer et les quartiers proches du port. De nouveaux équipements culturels et architecturaux attirent des visiteurs venus découvrir une ville qui conjugue patrimoine ancien et réalisations contemporaines. Les collines, le littoral, les calanques et le centre urbain forment un ensemble où coexistent activités portuaires, services, industries, enseignement supérieur, recherche, tourisme et création artistique.
La ville s’inscrit désormais dans une dynamique métropolitaine plus large qui associe communes littorales, arrière-pays et pôles économiques voisins. Les transports collectifs se développent, le réseau de tramway se réinvente, le métro et les liaisons ferroviaires renforcent le rôle de carrefour. Le port reste un acteur structurant, aussi bien pour les échanges de marchandises que pour les croisières et les liaisons maritimes régionales. Entre héritage grec, stratifications médiévales, âge d’or commercial, traumatismes du XXe siècle et projets contemporains, Marseille continue de se définir comme une grande ville méditerranéenne en mouvement, fidèle à une histoire haute en couleurs tout en explorant de nouvelles façons d’habiter son territoire.